Un tour d’horizon sur l’origine du Groupe canadien d’endocrinologie pédiatrique (GCEP), ou le Canadian Pediatric Endocrine Group (CPEG).

Mise en garde : Chacun de nous a sa propre vision pour décrire l’histoire du GCEP. Le texte qui suit porte un regard sur le passé, couvrant une quarantaine d’années, sur l’évolution de l’endocrinologie pédiatrique au Canada. Cette perspective vous est donnée par les trois D bien connus du milieu : la docteure Dean, le docteur Daneman, et la docteure Deal.

Plusieurs événements se sont produits, sur une période relativement longue, qui inévitablement allaient mener à la création du GCEP. Cette société indépendante a toujours eu à cœur non seulement les intérêts des professionnels canadiens de la santé en endocrinologie pédiatrique, mais également celles de leurs patients. Voici les questionnements qui les ont motivés (cette liste est possiblement incomplète) :

  1. Les nombreuses questions soulevées par les thérapies avec hormones de croissance. Il faut savoir qu’autrefois, c’était le Conseil de recherches médicales du Canada (CRM), remplacé depuis par les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), qui était responsable de la production et de la distribution de l’hormone de croissance dérivée de l’hypophyse. Henry Friesen, de Winnipeg, en a été le premier répondant, assisté d’un nombre restreint de ses collègues endocrinologues pédiatriques à travers le Canada (dont le docteur Harvey Guyda à Montréal, John Bailey à Toronto et, éventuellement, la docteure Heather Dean à Winnipeg). L’étude menée par le CRM couvrait dans tous les hôpitaux pédiatriques du Canada les soins offerts aux enfants ayant une déficience en hormone de croissance. Le but de l’étude était non seulement d’établir une définition normalisée, mais également d’assurer une répartition équitable de cette hormone. Quand la crise de la maladie de Creutzfeldt–Jakob frappa en 1985, le CRM cessa de produire l’hormone dérivée de l’hypophyse, amenant l’industrie pharmaceutique à en assurer la fabrication de façon biosynthétique. En premier lieu, on administra cette hormone à titre compassionnel, pour éventuellement demander le remboursement des coûts. La mise en œuvre de cette pratique a été étroitement supervisée par la communauté pédiatrique d’endocrinologie selon des critères stricts quant à l’émission des ordonnances et des posologies utilisées. Les endocrinologues pédiatriques impliqués dans l’étude du CRM s’étaient engagés à poursuivre leur collaboration, et ont ainsi créé le comité consultatif canadien sur l’hormone de croissance. Ce comité a travaillé de pair avec l’industrie pharmaceutique de 1985 à 1996, sous la présidence de la docteure Heather Dean. Cette collaboration a également mené à la mise sur pied d’une étude transcanadienne portant sur le syndrome de Turner et l’utilisation de l’hormone de croissance. Pour s’assurer de mises à jour continues, ce groupe d’étude a tenu des réunions annuelles avec ses chercheurs et ses commanditaires. Subséquemment, cette étude a été dirigée par les docteurs Dave Stephure de Calgary, Jack Holland de Toronto, et Guy van Vliet de Montréal. C’est en1996 que l’on vit apparaitre les premières publications quant à l’utilisation de l’hormone de croissance chez des patients atteints du syndrome de Turner. [Les résultats finaux de l’étude ont été publiés dans le JCEM 2005 ; 90 (6) : 3360-3366.]
  2. Au même moment, une nouvelle génération d’endocrinologues pédiatriques commençait à s’intéresser davantage au diabète de type 1, et à arrimer leur carrière universitaire avec la section clinique et scientifique de l’Association canadienne du diabète (à présent connue sous le nom de Diabète Canada). Ce sont ces mêmes endocrinologues qui ont pris part à la rédaction des premières lignes directrices portant sur les soins du diabète au Canada. Ils étaient parrainés par le comité d’experts du Conseil consultatif canadien sur le diabète, avec comme président, M. H. Tan, coprésident, D. Daneman, et R.M. Ehrlich, M. Jenner, et R MacArthur, comme participants). CMAJ 1992 ; 147 (5) : 697-712. Tous ces intervenants, principalement impliqués dans les soins du diabète, ont uni leurs efforts à celui du groupe travaillant sur l’hormone de croissance afin de mettre sur pied une association indépendante en endocrinologie pédiatrique.
  3. La troisième force fédératrice s’est concentrée à former de futurs spécialistes dans ce domaine. L’endocrinologie pédiatrique avait depuis été reconnue par le Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada comme une sous-spécialité pédiatrique indépendante, ayant à son bord des spécialistes intéressés dans la formation et l’administration des examens. Sous la direction du docteur Harvey Guyda, des fonds provenant de sociétés pharmaceutiques ont été amassés afin de soutenir la formation de cette sous-spécialité. La première bourse, octroyée par la société Eli Lilly Canada, a été remise à la docteure Margaret Lawson en 1993. Cette bourse lui a permis de poursuivre sa formation à Toronto. Depuis ce temps, et jusqu’à ce jour, ces sources de financement ont permis à plus de 55 stagiaires de recevoir une partie, ou la totalité, du soutien nécessaire afin de parfaire leur formation.
  4. C’est en 1995 que la décision de passer du comité consultatif canadien de l’hormone de croissance à la création d’une association plus formelle d’endocrinologues pédiatriques canadiens a été rendue. Une trentaine de participants étaient présents lors de cette première réunion. Lors de l’assemblée tenue en 1996, voici quelques-uns des sujets qui ont été discutés :
    • Quel nom allions-nous choisir pour définir notre association : le nom GCEP ou Groupe endocrinien pédiatrique canadien (possiblement encouragé par le Groupe endocrinien pédiatrique australasien ou le GEPA) fut rapidement accepté.
    • Financement : tous étaient d’accord pour dire qu’il existait un réel besoin d’obtenir rapidement une indépendance financière vis-à-vis de l’industrie, une décision qui a atteint son objectif au fil du temps.
    • Incorporation : étant donné la petite taille de notre groupe à ses débuts (33 en 1996, comparativement à près de 180 en comptant les stagiaires en 2019), il a été convenu que nous ferions nos débuts en tant que section de la Société canadienne d’endocrinologie et de métabolisme (SCEM), avec une première rencontre lors de la réunion annuelle combinée de Diabète Canada et la SCEM, suivi d’un deuxième rassemblement lors de l’assemblée annuelle du GCEP.
    • Gouvernance : le premier comité exécutif du GCEP a été désigné en 1996 avec le docteur Denis Daneman de Toronto comme président (1996-1999), la docteure Cheri Deal de Montréal comme vice-présidente, et la docteure Heather Dean de Winnipeg, comme secrétaire-trésorière. Vous trouverez la liste des présidents subséquents du GCEP ici.
    • Nous devions encourager les projets impliquant des collaborations avec le GCEP : l’étude du syndrome de Turner et de l’utilisation de l’hormone de croissance servit de modèle, pour ensuite donner naissance à de nombreuses collaborations sous les auspices du programme canadien de surveillance pédiatrique (œdème cérébral lors d’épisodes d’acidocétose diabétique, épidémiologie du diabète de type 2, persistance de la microalbuminurie chez les patients diabétiques de type 2, crises addisoniennes induites par l’inhalation de stéroïdes). Des projets indépendants ont également été initiés, dont un projet portant sur la variation des essais sur l’hormone de croissance au Canada, puis sur la déficience en hormone de croissance chez les patients présentant le syndrome de Costello, et une étude sur la gestion de l’hyperplasie congénitale des surrénales.

L’ampleur du succès du GCEP se mesure de plusieurs façons. Certes, le nombre de membres n’a cessé d’augmenter en raison de la mise en place de plusieurs activités, que ce soit dans le domaine clinique, de la recherche ou de la formation, et ceci dans des champs d’expertise allant de la santé osseuse et les troubles osseux, l’obésité infantile et le diabète de type 2, la dysphorie de genre, ainsi que l’utilisation de plus en plus importante de la technologie dans la gestion du diabète de type 1. Le GCEP a également collaboré avec succès avec le groupe des infirmières en endocrinologie pédiatrique du Canada (ICEP). Toutes ces démarches ont permis au GCEP de devenir financièrement indépendant et de pouvoir se séparer de la SCEM.

Remarque personnelle : depuis sa création, le GCEP a suscité un sentiment de respect mutuel et d’appartenance, et a continué d’encourager ses membres à collaborer afin d’établir des normes ainsi que des lignes directrices, de développer des essais multicentriques, et d’offrir de la formation dans cette sous-spécialité. La qualité des présentations des stagiaires lors des récentes assemblées témoigne de l’excellence grandissante des programmes de formation.

Un franc succès ! Continuons d’aller de l’avant.

Dre Heather Dean, présidente du comité consultatif du comité sur le GH de 1985 à 1996 et première secrétaire-trésorière du GCEP de 1996 à 1999.
Dr Denis Daneman, président inaugural du GCEP de 1996 à 1999
Dre Cheri Deal, première vice-présidente du GCEP de 1996 à1999 et présidente du GCEP de 1999 à 2002.

Le GCEP en tant qu'association indépendante

C’est en 2007 à London, Ontario, que le Groupe canadien d’endocrinologie pédiatrique / Canadian Pediatric Endocrine Group (GCEP/CPEG) a pu tenir sa première rencontre distincte. En effet, les endocrinologues pédiatriques canadiens se rencontraient régulièrement avant cette date, mais ces rencontres avaient toujours lieu lors de rencontres de groupes plus importants, comme lors des congrès conjoints de l’Association canadienne du diabète (maintenant Diabète Canada) et de la Société canadienne d’endocrinologie et de métabolisme, ou encore lors de rencontres de groupes ayant un mandat plus restreint, tels que le Comité consultatif canadien sur l’hormone de croissance. C’est en 1996 que le GCEP devint officiellement une section distincte du CSEM. Néanmoins, les endocrinologues pédiatriques continuaient d’espérer de pouvoir devenir un groupe indépendant. C’est la raison pour laquelle en 2006, le GCEP créa sa propre association et commença à organiser son congrès annuel. Il est important de noter qu’on ne retrouve pas uniquement des médecins spécialistes au sein du GCEP, mais également des scientifiques, du personnel infirmier, ainsi que d’autres professionnels de la santé œuvrant dans le domaine des soins et de la recherche en endocrinologie pédiatrique. Nos stagiaires peuvent bénéficier de bourses de formation offertes par le GCEP lors de concours, et cela grâce à des subventions à caractère éducatif, que l’industrie verse sans restriction. Depuis sa création, le GCEP a vu croître de façon constante non seulement son adhésion de nouveaux membres, mais également le taux de participation à ses réunions.

Docteur Guy van Vliet, Président du GCEP, 2005–2007


Voir aussi la présentation de la Dre Cheri Deal intitulée A (Brief) Growth Hormone History in Canada.